Le Clandestin

Publié le par Antohn

« J'ai entendu dire que ça portait bonheur d'avoir un chat à bord. »

La jaquette du DVD français (source: nanarland.com)

 

Dans la famille des films d'horreur, le sous-genre du « slasher » fait partie des plus populaires. Tout d'abord parce que les scénaristes ont rarement à se fouler pour les écrire mais aussi, du point de vue des spectateurs qui peuvent s'enfiler un film d'horreur avec la certitude qu'ils passeront quand même une bonne nuit et qu'ils pourront regarder un plat de tripes à la mode de Caen sans pour autant tourner de l'œil. A de rares exceptions près, un slasher ne fait pas si peur que cela tant ses codes sont connus de tous, le suspense consistant avant tout à savoir qui se fera tuer et dans quel ordre tout en se demandant comment les deux survivants en puissance (comprenez par là les deux jeunes premiers qui ont leur noms au tout début du générique) vont parvenir à s'en sortir. Le plaisir se décuple encore quand le film est mal fait, quand la perche du preneur de son se voit dans le cadre, quand le sang est de façon trop visible remplacé par du ketchup, le summum étant atteint quand on aperçoit, à l'arrière-plan, un stagiaire traverser le décor.

Membre donc d'une lignée nous ayant offert pas mal de nanars, « Le Clandestin » se démarque de ses cousins non pas par sa médiocrité (il est mauvais mais là n'est pas le plus croustillant) mais par la personnalité du tueur sanguinaire pourchassant les héros dans un espace clos (ici un yacht). Car oui, tremblez pauvres mortels, l'incarnation de la mort ressemble à ceci:

"You're talking to me?"

 

Sous ses dehors de bon gros sosie de Garfield ce chat est en fait un tueur redoutable échappé d'un laboratoire à la sécurité pour le moins défaillante. Modifié génétiquement, il est capable, un peu comme le xénomorphe d'« Alien », de faire jaillir une bouche rétractable (ou carrément d'« accoucher » d'une autre créature, je n'ai pas très bien compris) inoculant un poison mortel dans le corps de ses victimes. Notons que ce n'est pas si ridicule que cela: si j'avais, moi, à fabriquer un mutant pour l'utiliser à des fins militaires je prendrais comme base un animal inoffensif comme le lapin ou le chat. De plus ce chat a l'air particulièrement placide: doublé par une peluche pour chaque scène d'action, doublé à la bouche par un comédien professionnel (qui lui font faire faire « miaou » dès qu'il apparaît et ce même s'il ne miaule pas), tout porte à croire qu'il s'agisse ici du matou du producteur, plus habitué à dévorer du Ronron© qu'à étriper de l'acteur de série Z.

Il y a pas à dire mais les combinaisons isolantes dans les labos de hautes sécurité, ça a de la gueule.

 

Matou mutant dans la nature, il va y avoir du sang sur les murs (vieux dicton)


Une fois l'engin de mort évadé de son laboratoire maléfique, il est l'heure de nous présenter les futures victimes. A commencer par l'accessoire indispensable à tout slasher digne de ce nom: les deux nymphettes aussi intelligentes que frileuses (si vous voyez ce que je veux dire). Celles-ci, avec une ruse qui ferait passer Arsène Lupin pour un voleur de scooter, débarquent en tenue de plage dans un hôtel de luxe à Miami en racontant qu'elles sont les nièces du propriétaires et qu'elles voudraient une chambre et plus vite que çà. Le réceptionniste, à qui on doit la lui faire trois fois par jour, les éconduit, elles font un scandale et se font repérer par un bon samaritain. Le samaritain en question s'appelle Walter Graham, ce que l'on appelle pudiquement un homme d'affaires, comprenez par là le genre d'affaires qui vous apportent, au mieux, quinze ans de placard, au pire, un pardessus en sapin. Mu par l'intention à peine voilée de se faire payer en nature dans les plus brefs délais, il prends les donzelles sous on aile, leur offre gîte et couvert et les invite même sur son yacht (avec piscine) pour une croisière vers les Caraïbes.

 

 

Pensant, visiblement, que ce monsieur n'a absolument aucune arrière-pensée, elles n'hésitent pas à aller dragouiller un beau-gosse caricatural et son copain moche caricatural et à les inviter à se joindre à elles pour la croisière, embarquant également avec elles un biologiste sympa qui traînait là et... le greffier meurtrier trouvé sur le ponton menant au yacht, le tout sans bien sûr demander l'autorisation au proprio du navire. Je vous laisse deviner la surprise de l'autre businessman libidineux: lui qui croyait avoir levé deux jolies nanas pour s'occuper lors de la traversée voit débarquer ses conquêtes n°543 et 544 avec un chat dans les bras et trois gugusses qu'il ne connait ni d'Eve ni d'Adam qui s'incrustent sur son navire. Parti pour les rejeter à la mer, il finit par les accepter à bord: non seulement il manque de personnel mais en plus l'imminence d'un contrôle fiscal le force à quitter au plus vite le territoire américain.

Rob Estes, également connu pour avoir joué dans "Melrose Place"; que voulez vous, quand on a pas de veine...


Vanilla Ice? Il me doit tout!


Les deux héros futés et falots qui se servent d'un sextant en guise de microscope.

 

La suite des évènements est assez prévisible, ce qui explique le fait que cet article soit assez  court: le chat fait quelques victimes, en commençant par l'alcoolique de service (vous n'avez jamais remarqué que la première victime d'un slasher a toujours un vice dans ce genre?), puis le bateau tombe en panne et la quasi intégralité du casting se fait trucider pendant que l'autre crève de faim. En attendant, l'assassin assassine, la crapule crapulise, les héros sont héroïques et les bimbos bimboïsent.

 

Il serait pas en train de nous traîter de feignasses?

- T'occupes.

 

Le film a beau durer une heure vingt à tout casser, on s'ennuie parfois assez ferme les moments les plus divertissants étant les attaques du chat. Malgré des maquillages plutôt réussis, celles-ci sont torpillées par un tout petit détail: le chat ressemble à ceci:

Tu t'es vu quand t'as bu ?L'attaque de la carpette géante. Un lecteur un peu observateur distinguera, à gauche, le bras du cascadeur.

 

Vous vous en doutez, l'image du tueur redoutable, qui en avait déjà pris un coup, est achevée à coups de baïonnette par les trucages: quand l'acteur attaqué ne se contente pas de faire semblant de se débattre avec une peluche, c'est un gant de toilette géant qui s'occupe de doubler le matou avec les conséquences catastrophiques que vous imaginez.

Tout ceci n'a pour but que de nous emmener vers le happy end syndical qui... comment dire... . Ce n'est pas qu'il soit bon, ce n'est pas qu'il soit mauvais, c'est juste que... . Bon, je sais que c'est un spoiler mais il faut que vous voyez çà:

 

 

Quant au twist final, bon, vous vous doutez bien de ce qui arrive quand on pense en avoir fini avec le tueur dans les slashers, le seul suspense étant de savoir si nous allons réellement avoir une suite. Suite qui n'a jamais vu le jour, et c'est bien dommage. Voilà c'était "Le Clandestin", la semaine prochaine, je vous montrerais l'utilisation du bébé phoque comme accessoire de self-defense.

 

 

Fiche technique:

 

Titre original: Uninvited

Réalisateur: Greydon Clark

Année: 1988

Pays: Etats-Unis

Durée: 1h 30

Genre: Les affreux forfaits d'un fieffé greffier.

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