Cadence de combat

Publié le par Antohn

"Beeeeeuuuuuaaaaargh!"

 

Aaah, Noël! La fête où nous nous réunissons ensemble pour fêter la naissance de celui qui est venu sur Terre apporter la joie dans le cœur des Hommes, les boules sur les sapins et les marrons dans le cul des poulardes. L'humeur est au beau fixe, tout le monde fait la paix avec tout le monde et, comble du bonheur, j'ai en stock pour ma dernière chronique de l'année l'un de ces nanars de compétition dont je me délecte souvent! Cerise sur le gâteau (très grosse cerise), il s'agit d'un nanar avec cette bonne vieille baderne d'Hulk Hogan dont je vous avais déjà vanté les talents d'acteur.

Après « Hannibal » et ses éléphants, je vais rester dans la catégorie des mastodontes avec ce film sobrement intitulé « Cadence de combat ».

 

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La jaquette de la VHS française. Je n'ai, à ce jour, toujours pas compris le lien profond entre le titre et le sujet du film, si ce n'est que l'équipe a bien dû galérer à le réaliser.

(source: nanarland.com)

 

Pour les malchanceux qui ne connaîtraient pas Hulk Hogan, ce charmant monsieur fut, dans les années 80 et le début des années 90, la principale star du catch américain, un type qui était à son sport ce que Mohammed Ali était à la boxe ou Pelé au football. Avec ses airs de viking et un physique impressionnant, (1m95, 150 kilos) Hulk Hogan, Terry Bollea de son vrai nom, se fit assez rapidement une place dans ce grand cirque qu'est le catch professionnel américain. En 1982, il partage même l'affiche de « Rocky III » aux côtés de Sylvester Stallone. Le film est un succès mais mécontente les promoteurs qui voient d'un mauvais œil le fait que l'un des chouchous de la foule se compromette dans le cinéma: au début des années 80, il y en avait encore pour vous soutenir mordicus que les matchs n'étaient absolument pas scénarisés.

 

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En 1989, quand sort « Cadence de combat », les choses ont un peu changé: la WWF (l'équivalent pour le catch de la NFL ou de la NBA) a réussi à faire de son produit un divertissement de masse et la plupart des salles qui se remplissaient et des postes qui s'allumaient pour suivre les programmes de cette fédération l'étaient pour voir Hulk Hogan mettre une pâtée au méchant du jour. Plus qu'un catcheur, Hogan est devenu une marchandise à part entière: on s'arrache des t-shirts à son effigie, des posters, des cartes à jouer, des bandanas, des jeux-vidéos, des figurines, des pin's, des peluches, des portes-clés, des autocollants... Hulk Hogan devient un peu le « Hello Kitty » du sport-spectacle: il n'y a pas un objet qui n'existe pas à son effigie.

Il lui restait donc à avoir son propre film à sa gloire et c'est lui-même, ainsi que le patron de la WWF, Vince Mac Mahon, qui décidèrent de produire ce qui devait être un hymne à la beauté de ce sport.

 

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Dans la catégorie "anecdote amusante qui remplit facilement une légende de vignette": le moustachu à gauche avec un couvre-chef insolite est Jesse Ventura, alors commentateur de catch pour la télévision. Il quitta ce poste pour se lancer dans la politique, avec succès vu qu'il fut gouverneur de l'Etat du Minnesota.

 

Ne sachant pas écrire de scénario, ils engagent un scénariste pour écrire un script. J'ignore ce que racontait ce script, cela ne devait probablement pas être bon vu qu'Hogan et McMahon décidèrent de s'enfermer dans une suite d'hôtel pendant trois jours pour réécrire le scénario à leur convenance.

Et le moins que l'on puisse dire c'est que scénario pareils, j'en veux encore tant celui-ci tombe dans le manichéisme bas du front.

 

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"Mani-quoi ?"

 

Hulk Hogan est, ici, « Rip », un catcheur aimé de tous, fort comme un turc et invincible champion de la WWF... Oui, en gros, il joue son propre rôle, on ne peut pas dire qu'il ait à forcer son talent pour être crédible. Rip démolit tous ses adversaires, la seule faiblesse semblan être l'affection qu'il a pour son petit-frère, pour qui il se bat depuis que leurs parents sont partis/disparus/en prison/décédés. « Cadence de combat » se voulant un spectacle pour petits et grands, à aucun moment qui que ce soit n'évoque l'hypothèse selon laquelle le catch pourrait être truqué.

Truqué ou pas, la seule chose qui compte est ici que Rip permet à la chaîne de télévision pour laquelle il catche d'exploser l'audimat, au grand dam de Brell, le méchant propriétaire de la World Television Network qui cherche en vain à concurrencer le catch, présenté comme le sport qui fait tourner le Monde.

 

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L'immonde Brell, qui veut dénaturer le noble art du catch.


Quoi de mieux pour concurrencer le catch que.. du catch? Les gens veulent de la bagarre? Ils vont avoir de la bagarre! Seulement Rip il est tellement fort, c'est tellement lui qui porte sa fédération sur ses épaules que ce serait peine perdue de vouloir lui tenir tête. La seule solution serait d'embaucher Rip en lui proposant une montagne de pognon... mais en plus d'être grand, beau, fort et intelligent, Rip est aussi fidèle et, non, il refuse de trahir ceux qui lui ont donné sa chance, il refuse de dénaturer son art, même pour beaucoup d'argent. La situation est d'autant plus cocasse que quelques années après la sortie de ce film, le « vrai » Hulk Hogan quitta la WWF après que le milliardaire Ted Turner (le propriétaire de la chaîne MTV) lui ait fait une proposition similaire.

 

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Histoire de mettre un peu de romance là-dedans, Rip passe également le film à dragouiller (Dragouiller, v., fam.: Se dit de l'acte de tenter de séduire quelqu'un tout en gardant un regard d'huître neurasténique) une jeune femme d'abord envoyée pr Brell pour le détourner du droit chemin, avant de tomber sous le charme du colosse.

 

Dépité, Brell, part chercher l'inspiration avec deux de ses larbins. C'est au cours de ses pérégrinations qu'il trouve enfin son concept novateur. Tel Paul Claudel qui fut touché par la grâce en assistant aux vêpres à Notre-Dame de Paris, Brell reçut l'Illumination. La seule différence étant que vous serez gentils de remplacer dans votre imagination la majestueuse construction par un bar crade dans un sous-sol de bas-fond de sous-préfecture annexe où le degrès d'alcool artisanal dans les verres crasseux excède le Q.I. moyen des clients édentés baignant dans leur vomi (vous noterez que j'ai été classe: pas un mot sur les cafards!).

Dans ce boui-boui, donc, ont lieu des combats clandestins. Le règles sont assez simples et ressemblent vaguement à celles du free-fight: on met un gros quick dans le ring, puis un second gros quick et ces gentlemen sont instamment priés de s'envoyer des mandales où ils veulent. Le vainqueur étant celui des deux qui reste debout à la fin.

 

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"A ma gauche: Le Sécateur de Winnipeg, 1m90, 120 kilos dont 5 de graisse et 10g de matière cérébrale active!"

 

« Bon sang mais c'est bien sûr! Voilà ce que veulent voir les gens: de la violence, du sang, de la cervelle répandue partout! Et non pas ces fillettes de catcheurs! » L'idée est alors lancée: à travers tout le pays, la World Television Network lance un vibrant appel aux brutes: « Vous pensez que vous êtes fort? Vous pensez que c'est vous qui avez la plus grosse? Nous avons besoin de vous! ». Ainsi est crée « La Bataille des Sanguinaires», une émission pas chère qui consiste à mettre des caméras dans le bar miteux cité plus haut et à laisser tourner pendant que des bas du front se mettent allègrement sur la tronche. L'audience explose, la WWF est menacée par ce spectacle ignoble, d'autant plus qu'un soir, un colosse fait son apparition. Tout ce que l'on sait c'est qu'il s'appelle Zeus, qu'il était catcheur mais qu'il aurait volontairement tué l'un de ses adversaires lors d'un match (whaou!), fraîchement sorti (évadé?) de prison, il explose, semaine après semaine, tous ses adversaires, finissant même par lancer un défi à Rip en direct à la télévision.

 

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A l'inverse d'Hulk Hogan, qui était passé des rings au cinéma, Tommy "Tiny" Lister, qui joue Zeus est un acteur devenu catcheur. Son succès devait dépendre de celui du film.

Résultat, il ne disputa que trois matchs... qu'il perdit à chaque fois.

 

Brell et ses hommes font évidemment tout pour empêcher la victoire de Rip, tentent de l'agresser, d'enlever sa fiancé, mettent son frère dans un fauteuil roulant, mais Rip surmonte toutes ces contrariétés jusqu'au combat final dont l'issue est prévisible.

Comme vous le constatez, le scénario est faiblard. Ce ne serait rien si ce film n'était pas torpillé par un petit problème:

Comme à son habitude, Hulk Hogan joue comme une savate.

Beaucoup de catcheurs opérant la transition du ring aux plateaux de cinéma ne se rendent pas compte que jouer les brutes est une chose, arriver sur le ring en bandant les muscles et en poussant des cris de mammouth en rut, c'est une chose, jouer de façon crédible en est une autre. Vous voulez un exemple? En voici un. S'il y a une scène que vous ne devez pas louper de ce film c'est celle-ci:

 

 

 

Chaque scène avec Hogan est un monument, non pas de non jeu, mais de mauvais jeu. Grogner et rouler des yeux semble être la seule chose qu'il soit capable de faire de façon plus ou moins crédible, dès qu'il s'agit de jouer autre-chose. Chaque apparition du colosse moustachu est un grand-moment et, Dieu merci, il apparaît souvent. Pour vous donner une idée de l'étendue du désastre: je ne me suis aperçu que vers la fin du film que son adversaire, Zeus, louchait.

 

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L'affrontement final a lieu sur un ring de forme étrange puisqu'octogonal. J'ai pensé d'abord qu'il s'agissait d'une fantaisie du décorateur, en réalité, certains matchs de free-fight ont lieu sur de tels rings.

 

Je n'irais pas jusqu'à dire que « Cadence de combat » est mon nanar préféré, ce n'est pas non plus le plus gros nanar du Monde mais c'est le genre de film à la débilité involontaire qui remplit de joie l'amateur de cinéma déviant. Prenant pour base un divertissement qui, à sa base, ne se prends déjà pas lui-même au sérieux (enfin, j'espère), mélangé avec un humour qui aurait sa place dans les cours de récré, « Cadence de combat » fait du bourrinage et du bas de plafond une oeuvre d'art comme on en fait peu, heureusement.

 

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"Merci!"

 

Fiche technique:

Titre original: No Holds Barred

Réalisateur: Thomas J. Wright

Année: 1989

Pays: Etats-Unis

Durée: 1h 30

Genre: Boeufs aux hormones

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