Black Ninja

Publié le par Antohn

 

« Je sais ce que tu te demandes: « Combien de balles il reste? ». Suffisamment pour t'envoyer en l'air, mec! »

 

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La jaquette de la VHS française (source: nanarland.com)

 

J'ai constaté une chose en parcourant la liste des articles publiés sur ce blog: si je parle souvent de films de série B et Z je ne vous ais jamais parlé de ce qui est l'un des symboles du genre: le film de ninjas. Guerrier de l'ombre aux capacités demeurées légendaires, le ninja est, à l'origine, le membre d'une secte d'assassins qui, comme les samouraï, parcouraient le Japon médiéval à la recherche d'un seigneur pouvant employer leur lame. Le plus souvent, ces ninjas étaient des paysans dont la naissance interdisait de devenir samouraï et qui ne pouvaient donc porter le sabre.

 

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Arrivé dans les scénarii de films hong-kongais le ninja s'est imposé pour une simple et bonne raison: son masque qui permet assez facilement à un cascadeur de remplacer un acteur pour les scènes de baston. Il y en a bien eu pour dire que mettre des ninjas à Hong-Kong était aussi idiot que de mettre des tyroliens à Locmariaquer mais leurs voix ne furent pas entendues, heureusement dans un sens vu que cela nous aurait épargné quelques éclats de rire.

 

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Difficile de parler de films de kung-fu hong-kongais sans parler de la Shaw Brothers ou de la Golden Harvest, maisons de production responsables, entres autres, de « La 36e chambre de Shaolin », « Un seul bras les tua tous » ou encore de « La fureur de vaincre », des films d'excellente qualités bien qu'appartenant à un genre trop souvent méprisé. Très rapidement, en effets, les grandes maisons de productions se sont mises à travailler avec d'autres producteurs moins importants, vendant les films aux distributeurs étrangers par lots: en gros ils vendaient un film de bonne qualité avec tout un tas d'autres films beaucoup moins chers voire même gratuits, ce qui donnait l'impression au distributeur de faire une bonne affaire faisait qu'ils ne discutaient pas le prix du film qui les intéressait. Quand aux films bradés avec, ils étaient souvent doublés à la va-vite par des comédiens payés au lance-pierre et sortis dans des cinémas de quartiers sous des titres aussi recherchés que « Casse-tête chinois pour le judoka », « Diamants sur karaté », « Moins il y a de Fu plus il y a de riz » ou encore « Un p'tit coup dans les baguettes »1.

 

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Là, par exemple, ca s'appelle "Back Ninja" parce que.... le héros est black et... que c'est un ninja.

 

 

« Black Ninja » fait partie de ces films qui ne servaient qu'à faire passer une pilule pas toujours très digeste aux distributeurs. Sorti en 1987, il n'eut pas droit aux honneurs du cinéma mais à ceux du vidéo-club, où sa VHS trônait au milieu de la section « Arts-Martiaux », n'attendant qu'une chose: qu'un client la loue un samedi soir parce qu'il n'aime pas « Sacrée Soirée ».

« Black Ninja » est avant tout le fruit d'une collaboration entre le réalisateur hong-kongais Godfrey Ho et l'acteur-réalisateur camerounais Alphonse Beni. Ce dernier est essentiellement connu pour être un véritable touche-à-tout, parcourant le Monde entier pour tâter tous les genres possibles et imaginables, y compris au film d'arts-martiaux et il y-a-t-il meilleur endroit pour pour s'y initier qu'Hong-Kong?

 

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Vous constaterez, en arière-plan, l'une des tables de pique-nique en béton du parc où étaient tournées les scènes de ninjas.

 

Godfrey Ho, quant à lui, est souvent considéré comme le Ed Wood du film d'arts martiaux et un maître dans la pratique dite du « 2-en-1 », méthode consistant à racheter à l'étranger (le plus souvent en Thailande ou en Corée) des films non destinés à l'exportation ou alors des rushs provenant de films inachevés. Ho les mélangeait avec des scènes tournées à Hong-Kong avec des acteurs occidentaux plus ou moins recrutés dans la rue, donnant un film dont les seules qualités étaient de durer une heure et demie et de comporter deux-trois scènes de bagarre (et si en plus il pouvait y avoir une gonzesse à poil, c'était parfait).

 

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"Allo? Je suis bien chez le type qui est sensé être dans le même film que moi?"

 

Godfrey Ho (qui, pour l'anecdote, est aujourd'hui professeur de cinéma à Hong-Kong) est également connu pour avoir roulé dans la farine deux ou trois de ses acteurs, dont Richard Harrison qui raconta avoir été engagé pour un seul film par Godfrey Ho et s'être étonné des méthodes de ce dernier. No seulement, on lui fournissait le matin du tournage d'une scène un script écrit dans un anglais très approximatif (à tel point que les acteurs anglophones laissaient tomber le script et improvisaient leurs répliques) mais, en outre, Godfrey Ho avait l'habitude de lui faire jouer des scènes sans aucune cohérence quand il ne lui demandait pas de recommencer plusieurs fois de suite la même scène après avoir fait pivoter la caméra d'un quart de tour.

Résultat, alors qu'il n'était payé que pour un film et qu'il regrettait déjà de s'être compromis là-dedans, Richard Harrison se rendit compte que Gofrey Ho avait intégré ces scènes à une vingtaine de films différents qui ont inondé les vidéo-clubs du Monde, ternissant la réputation d'un acteur qui ne méritait pas un tel traitement.

 

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"Bien sûr que je suis un ninja! Vous savez pas lire?"

 

Ici, Richard Harrison est sensé s'appeler Gordon, il est l'ami du héros, Alvin (Alphonse Beni), agent d'Interpol à Paris qui, lors de la scène d'ouverture (qui se passe à Paris: la preuve, le film s'ouvre sur une vue de Paris et les trafiquants transportent de la drogue dans des baguettes), arrête un homme de main du parrain de la drogue, Rudolf. Ce dernier, chef d'une bande de ninja, envoie des hommes éliminer cet homme de main, et, histoire de faire bonne mesure, tuent la femme d'Alvin... il faut les comprendre, ils ne pouvaient pas deviner que l'autre veuille se venger.

Ivre de colère, Alvin s'embarque pour Hong-Kong à la poursuite de Rudolf et se voit aidé par Gordon, comme lui agent d'Interpol et maître ninja.

 

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"Non ce n'est pas une carte postale filmée en gros plan! C'est une vraie vue de Paris, on est vraiment allés tourner là-bas!"

 

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"Et puis à votre avis on est allé les chercher où ces baguettes?"

 

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"Et çà? Non c'est pas la baie de Hong-Kong! C'est la Seine!"

 

Parralèlement, le spectateur suit une autre histoire, celle de trois jeunes gens qui partent à la recherche du principal lieutenant de Rudolf. Pour ceux qui en douteraient, il s'agirt d'un film tourné avec des acteurs asiatiques à aucun moment dans le film, acteurs asiatiques et européens ne se rencontrent. Lors d'une interview au site nanarland.com, Godfrey Ho soutenait mordicus qu'il n'avait jamais pratiqué le « 2-en-1 » et que les deux films étaient tournés en même temps, par deux équipes de tournage différentes et le tout en suivant un scénario cohérent. Ces déclarations laissent dubitatif quiconque a vu un film de Godfrey Ho.

La seule certitude que nous ayons est que Godfrey Ho prends pas mal de monde pour des imbéciles.

 

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Le type avec le bandeau est sensé être le héros de la partie asiatique du film. Pour des raisons que j'ignore, le responsable de la VF a décidé de l'appeler "Edmond".

 

Vous constaterez que je ne vous ais pas encore parlé de Rudolf ni de l'acteur qui l'incarne., à savoir Stuart Smith, l'homme qui a élevé le surjeu au rang des beaux-arts. Alors en voyage à Hong-Kong, il fut approché par Godfrey Ho qui cherchait des acteurs blancs pour tourner dans ses films. Smith ayant fait un peu de théâtre dans sa jeunesse il accepta mais, il fut le premier à le reconnaître par la suite, il suivit un peu trop à la lettre les instructions de Godfrey Ho lui demandant d'accentuer son jeu, donnant un résultat pour le moins cocasse.

 

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On ne s'en lasse pas.

 

Stuart Smith qui cabotine à en faire passer Courtemanche pour un modèle de retenue, Richard Harrison qui, pour des raisons qu'il sera facile de deviner, fait le minimum.... tout le film repose finalement sur Alphonse Beni qui est le seul à réellement prendre son rôle au sérieux, il faut dire que « Black Ninja » est avant tout son film à lui, Godfrey Ho n'étant là que pour la partie technique. Ho, d'ailleurs ne conserve pas de grands souvenirs d'Alphonse Beni, ni de ce film qu'il considère comme « complètement naze » et on ne saurait que lui donner raison.

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United colors of costumes à la con

 

1Inutile de préciser que tous ces titres sont authentiques.

 

 

Fiche technique:

Titre original: Ninja Silent Assassin

Réalisateur: Godfrey Ho

Pays: Hong-Kong

Année: 1987

Durée: 1h 25

Genre: Cabotins et galipettes

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