Mantera

Publié le par Antohn

Mantera

L'une des raisons pour lesquelles je pars du principe que tous les films méritent d'être vus c'est que parfois vous tombez sur des films qui ne paient pas de mine mais qui vous donnent plus de plaisir que des chefs-d’œuvre "officiels". Et Dieu sait que ce blog en est plein (si tant est que Dieu lise mes articles mais j'en doute).

Plus que tout, ça me permet de contribuer à battre en brèche ce concept idiot selon lequel il y aurait des genres mineurs au cinéma et qu'un film conçu uniquement pour le divertissement serait forcément une merde. Regardez: là, si je vous dis que je vais vous parler d'un film de robots russo-malaisien, il y a de fortes chances pour que vous vous demandiez ce qui m'a pris de regarder ça et que pour vous partiez avec un a-priori défavorable.

Bon, dans le cas qui nous occupe vous auriez raison.

Mantera

Vous vous en doutez, le film n'a pas les moyens d'un Michael Bay, qui reste quand même la référence quand il s'agit de montrer des robots qui se foutent sur la tronche. Il y en a suffisamment, quand même, pour que les robots soient animés en CGI et non joués par des acteurs en costume. Maintenant, il y a CGI et CGI et les robots de "Mantera" ont la particularité d'être suffisamment détaillés pour ne pas être ridicules mais suffisamment mal animés pour sentir les images de synthèse à plein nez. Le film date de 2012 et on est dans des cinématiques de style "fin PS2 début PS3".

De même, même s'il s'agit du seul films des réalisateurs, la direction est tout à fait correcte. Aucun éclair de génie non plus, il en est de même pour les acteurs qui, sans être fabuleux, font leur boulot.

Des effets spéciaux cheap, une réalisation et un jeu sans relief particulier ne rendent pas un film mauvais, ils le font juste concourir pour le titre de "film potentiellement sympa mais vite vu et vite oublié à cause de certains défauts". Le seul soucis avec "Mantera" c'est que ces "défauts" sont, par comparaison, ses principales qualités car tous le reste cloche de façon velue.

"Transformers ? Connais pas".
"Transformers ? Connais pas".

Ce qui cloche, c'est avant tout le scénario. Pour faire simple, j'ai rarement vu autant de clichés et de manichéisme dans une œuvre destinée à un public âgé de plus de 10 ans. Et dès le début le ton est donné quand une voix-off nous explique que nous sommes en 2020 et que, depuis des siècles, l'Alliance de la Lumière mène une guerre sans merci contre les Légions Noires (désignées sur la jaquette comme "Les Légions Obscures de l'Apocalypse"). Déjà, là si tu n'a pas compris qui sont les gentils et qui sont les méchants, lecteur, je peux pas grand chose pour toi. Mais rassures-toi, tu n'aura que ça à comprendre: à aucun moment, par exemple, on ne nous expliquera ce que sont les Légions Noires: les troupes d'un superméchant, les troupes d'un pays dont-on-ne-donne-pas-le-nom, des aliens ? On en sait rien, c'est des méchants point barre. Tout ce que l'on sait c'est qu'ils noyautent la plupart des grandes multinationales du Monde dans une perpétuelle course à l'armement.

Les Légions Noires entretiennent le capitalisme, tu la sens la grosse symbolique, lecteur ?

"Stargate ? Jamais entendu parler".
"Stargate ? Jamais entendu parler".

C'est d'ailleurs dans les laboratoires d'un centre de recherche géré par les Légions Noires que l'équipe du professeur Natacha Pouchkine (jouée par une ancienne Miss Monde ukrainienne, histoire de compléter les clichés) mets au point le "Mantera" acronyme de "MAN - Transformable Exo-Robotic Armour". Si on peut traduire ça du charabia en français, disons qu'il s'agit d'un exosquelette évolutif, pouvant permettre de faire fusionner son porteur avec son véhicule (une moto dans le cas qui nous occupe). Un inconvénient toutefois : le Mantera ne peut être activé que par un être au cœur pur. Pourquoi ? Et ben parce que... "ta gueule c'est magique" comme on dit chez les rôlistes.

D'ailleurs, en parlant de cœur pur, le second inconvénient, c'est Natacha elle-même, qui finit par craindre qu'une arme aussi redoutable ne soit utilisée à mauvais escient. Pour sa défense, elle ne sait pas que Les Gros Vilains de l'Apocalypse gèrent sa boîte en sous main mais voir un concepteur d'arme craindre que son invention ne tue des gens c'est un peu comme voir MacDo craindre que sa bouffe ne contribue à rendre les gens obèses.

Mantera

N'écoutant que son courage, et les mails d'un type qu'elle ne connaît pas lui ordonnant de le faire, Natacha s'enfuit du laboratoire après avoir détruit le résultat de ses recherches et envoyé le seul prototype du Mantera loin, très loin. Par "très loin", comprenez qu'une dizaine de caisses contenant le Mantera en pièce détachées sont envoyées en Malaisie à une jeune garçon du nom d'Azman. Il faut croire qu'il s'agit de l'être au cœur pur qui va nous servir de héros, même si rien ne nous le montre comme un être particulièrement bon. C'est un ado normal, qui est le souffre douleur d'une bandes de brutes dans son lycée (et un cliché de plus!) mais ça, et je parle d'expérience, ne fait pas de vous un être bon. Ce serait même plutôt l'inverse.

Heureusement, il est secondé d'un sidekick mécanicien et de Deena, une apprentie ingénieure de génie, il lui faudra bien ça pour assembler sans mode d'emploi une machine dont la conception a mobilisé des dizaines de chercheurs surentraînés.

"Matrix Reloa-quoi ?"
"Matrix Reloa-quoi ?"

Azman se retrouve donc doté, sans trop savoir pourquoi, d'une moto hyper badass avec laquelle il brûle de la gomme... et stalke Deena parce que, si a bien compris l'esprit du film tu te doutes bien qu'ils finiront ensemble assez rapidement. Il faut qu'il finisse par se faire heurter par un camion pour que l'on saisisse le potentiel du Mantera.

Mais là aussi c'est assez mal amené : on voit le camion heurter Azman puis tout de suite, une scène où on le voit jouer au basket (Azman, pas le camion). Il faut que Deena arrive pour lui demander comment il a fait pour se transformer en robot au dernier moment en fusionnant avec sa moto pour que l'on ait droit à un flashback nous expliquant ce qu'il s'est passé.

Azman apprend donc qu'il peut se transformer en robot quand le danger vient. Et le danger va venir puisque l'activation du Mantera a également entraîné sa balise de détection, ce qui permet à la fois aux Gentils et aux Méchants (je vais finir l'article en les appelant comme ça, ça sera plus simple) de le repérer et de partir à sa recherche. S'ensuit évidemment une course entre les deux côté de la Force, culminant, évidemment, dans la grande baston de robots finale entre Azman et une arme secrète quelconque. Évidemment, Azman se fera rétamer, avant de se relever et de gagner revigoré par le pouvoir de l'amitié. Et par une technique secrète que lui a apprise un maître d'arts martiaux qui passait par là et qui, vingt minutes avant, l'avait transformé en ceinture noire de karaté.

Et, parce que ce film ne pouvait pas se terminer sans un cliché, le Méchant en chef réapparait une dernière fois pour promettre de se venger, augurant une suite qui, aux dernières nouvelles n'a pas vu le jour.

Grâce à un subterfuge idiot, les amis d'Azzman assistent au combat final en direct à la télé, dans un bar, dans une ambiance digne des plus belles soirées de Ligue 2.
Grâce à un subterfuge idiot, les amis d'Azzman assistent au combat final en direct à la télé, dans un bar, dans une ambiance digne des plus belles soirées de Ligue 2.

En définitive, "Mantera" est le genre de film dont on n'attend pas grand chose mais qui avait le potentiel pour être une série B sympa. On pouvait même lui pardonner ses CGI foireuses si elles étaient au service d'un scénario un peu intéressant et de personnages attachants. Au lieu de cela nous avons droit à des personnages plats (aucun d'entre eux n'a le moindre background, pas même le héros) et un scénario aussi stéréotypé que débile dès qu'il essaie de proposer quelque chose d'original. Honnêtement, ça faisait un petit moment que je n'avais pas dû mettre un dvd sur pause pour laisser éclater un fou-rire. Vois, par exemple, Natacha échapper à un poursuivant en se réfugiant dans un magasin de burqa à la "Tintin au Pays des Soviets" et tu comprendra.

Tu t'amusera ensuite à repérer tous les emprunts plus ou moins assumés à des franchises plus connues. On va être gentils et parler d'"hommages".

Le pire étant que ce film ne peut même pas être considéré comme un nanar, les passages idiots étant trop dilués dans des passage simplement inintéressants. Il aurait pu être une bonne surprise, "Mantera" est juste un film sans saveur, réunissant plus de clichés que les archives du National Geographic. Un film de S.F. comme il y en a d'autres, semblant venu d'un coffre à jouets pas assez souvent ouvert.

Fiche technique :

Réalisateurs : Aliyar Ali Kutty et Miza Mohamad

Pays : Malaisie/Russie/Dubaï/Syrie

Année : 2012

Durée: 1h30

Genre: Conserves recyclées.

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