Vite Vu : Lost River

Publié le par Antohn

Vite Vu : Lost River

J'ai beau habiter à cinq minutes du cinéma de mon patelin, je n'y vais que rarement. Il faut dire que je vis dans un endroit habité essentiellement par des personnes âgées et des couples avec enfants, donc la programmation s'en ressent. J'ai ainsi appris à avoir davantage le réflexe du DVD que celui de la salle obscure et, lorsque j'y vais, c'est souvent sur un coup de tête.

Tiens, par exemple, tu sais pourquoi je suis allé voir "Lost River", lecteur ? Simplement parce que je savais qu'il s'agissait d'un film fantastique (et ça j'aime)... et que Barbara Steele jouait dedans. Le fait qu'il s'agisse du premier film de Ryan Gosling, par exemple, je m'en fichais, je le connais assez mal en tant qu'acteur mais ces preuves de bon goût sus-mentionnées me l'ont rendu sympathique. Et la suite m'a donné plutôt raison.

Et pourtant je cherche encore la dimension fantastique du film et, concernant Barbara Steele... disons que ça m'a fait plaisir de savoir qu'elle tournait encore, vu qu'elle ne prononce pas un mot de tout le film.

Vite Vu : Lost River

Plus que de "film fantastique", il vaut mieux classer "Lost River" dans la catégorie des "drames onirique", dans la mesure où le merveilleux n'intervient presque pas. Si l'univers parait fantastique; il est en réalité bien réel.

"Lost River" est le nom d'une bourgade sinistrée qui ressemble tellement à certains quartiers de Detroit que personne ne tombera de sa chaise en apprenant qu'une partie du film y a été tournée. Tout le monde a vu ou entendu parler de ces quartiers où tout le monde, avant la crise des subprimes, avait contracté des emprunts toxiques et où tout le monde a petit à petit vu sa maison saisie par la banque. Et vu que personne ne voulait acheter une maison dans un quartier sinistré et dans une ville où il n'y a pas de boulot, ces endroits sont devenus de véritables cimetières de maisons où le plus étonnant est d'y voir encore des gens vivre.

C'est pourtant là-dedans que Billy (Christina Hendricks) tente d'élever ses deux enfants, espérant garder sa maison pendant que son aîné, Bones (Iain de Caesteker) vole du cuivre dans les maisons en ruine pour acheter de quoi réparer cette voiture qui lui permettra, lui et sa famille de quitter cet enfer. En attendant, Billy oeuvre dans un cabaret grand-guignolesque qui le désemplit pas, et qui semble être la seule distraction des gens du coin.

En gros, des gens pleins de doutes et d'espoirs déçus ne parviennent à trouver le réconfort que dans l'évocation de ce qui est notre seule certitude à tous: la mort. Ou alors c'est juste un hommage aux giallos et aux films macabres italiens (ce qui expliquerait la présence de Barbara Steele au générique)... et c'est bien aussi.

Ce qui marque, également, c'est l'ambiance "post-apocalyptique sans l'apocalypse" du film, Lost River semblant une terre d'où personne ne s'échappe remplie d'être maudits, condamnés à une vie sans but. Que ce soit Billy, qui veut garder une maison inutile, la Grand-Mère, qui depuis la mort de son mari passe ses journées à regarder la vidéo de son mariage... ou même Bully, une espèce de caïd se sentant fort parce qu'il règne sur un cimetière et à la violence aussi stupide qu'elle ne semble exister que pour elle-même.

Et si, finalement, ce n'était ceux qui y vivent mais la ville elle-même qui est maudite ? Et si le destin de Lost River était lié à celui de la ville précédente, engloutie sous un barrage. Et si cet endroit était lui aussi pris dans une boucle ? Condamné à abriter la vie avant d'être détruite par la spéculation immobilière.

En définitive, "Lost River" est un film portant une histoire et une ambiance originale et prouvant qu'originalité peut être synonyme de qualité. On sent quand même qu'il s'agit d'un premier film : il y a deux trois plans un peu inutilement compliqués (mon Dieu, qu'est-ce que c'est cuistre comme réflexion), mais pour un coup d'essai, c'est un joli coup.

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