La Vallée de Gwangi
Autant mon gout pour les films de dinosaures n'est plus un secret pour grand monde, autant, en 5 ans, je crois que je ne vous ai jamais dit que j'aimais les westerns (ou alors je l'ai dit mais pas fort). Le seul soucis est que trouver un western Brocoli-compatible n'est pas chose facile : je me voyais mal écrire un article sur "Mon nom est Personne" ou "Cinq cartes à abattre".
Restait à trouver un western sortant de l'ordinaire... alors pourquoi pas un western avec des dinosaures ? Au début j'avais pensé à "The Beast of Hollow Mountain" mais force est de constater qu'il s'agit d'un naveton sur lequel il m'aurais été compliqué d'écrire. Sans être le pire film de dinos que j'ai vu, disons que ce n'est pas le meilleur.
C'est alors que me vint l'illumination : après tout, dans mon salon, trône quand même l'affiche de "La Vallée de Gwangi", que je devais bien avoir sur un disque dur quelque part. Et par chance, non seulement c'est un film sympa mais en plus il y matière à en dire des choses.
Sorti en 1969, ce film est pourtant l'aboutissement d'un projet de près de 30 ans. Le premier script fut soumis en 1941 à la société de production RKO-Pathé par Willis O'Brien, à qui l'on doit notamment les effets spéciaux du premier "King Kong" ainsi que ceux du premier "Monde Perdu". On sait peu de choses de l'histoire, si ce n'est qu'elle mettait déjà en scène un dinosaure du nom de Gwangi, ce qui signifierait "lézard" dans une langue indienne (laquelle ? je n'en sais rien). Il devait probablement être une sorte de variante de "King Kong", en témoignent les similitudes scénaristiques entre les deux films.
Willis O'Brien étant décédé en 1962, il ne vit jamais ce projet se concrétiser, quelques scènes préparatoires, seulement, ayant été réalisées. N'étant, donc, pas disponible, c'est à un autre génie des effets spéciaux et de l'animation image par image que les créatures furent confiées: Ray Harryhausen.
Admirateur de Willis O'Brien, qui fut à la fois son modèle et son mentor, Ray Harryhausen avait fini par dépasser le maître, notamment après avoir signé les effets spéciaux de "Jason et les Argonautes". Dans ce film, une scène, notamment, avait marqué les esprits: c'était une bataille entre Jason et une armée de squelettes, animés image par image puis intégrés aux plans avec l'acteur. Ce tour de force avait pris plus d'un an à être réalisé (la scène dure deux ou trois minutes mais Harryhausen ne pouvait en filmer qu'une demi-seconde par jour) et avait bluffé les spectateurs de l'époque.
Ici, le tour de force est moins dans l'inventivité des trucages que dans leur nombre, parce que des dinos on va en avoir et pas que ça ! Ca vaut pour les films qui vous promettent des dinos que vous ne voyez que cinq minutes sur une heure vingt de métrage. Il y en avait tellement que Ray Harryhausen n'eut pas le temps d'effectuer des tests pour les éclairages, ce qui fait que plusieurs créatures changent régulièrement de couleur au gré des plans.
L'histoire en elle-même semble inspirée, tout autant de "King Kong" et du "Monde Perdu". Quelque part au Nouveau Mexique, une troupe de saltimbanques survit en présentant un Wild West Show avec des indiens, des tireurs d'élite, des cow-boys et des attaques de diligence... le clou du spectacle étant l'écuyère, TJ, qui saute d'une plateforme avec son cheval dans un baquet d'eau entouré de flammes. Les affaires vont mal mais voilà que le fils prodigue revient opportunément. Le fils prodigue, en l'occurence, c'est Tuck, un ancien artiste de la troupe, devenu promoteur lorsqu'il se rendit compte qu'il était plus lucratif de vendre les numéros des autres que de mettre au point les siens. Un homme pragmatique pour certains, une saleté de vendu pour d'autres.
Quoi qu'il en soit, si Tuck est revenu chez ses anciens amis c'est parce qu'il a une offre à faire. Le cirque manque de liquidités ? Et bien pourquoi ne pas vendre le cheval de TJ ? Cette belle bête suscite bien des convoitises (je parle du cheval) et l'argent qu'elle pourrait rapporter permettrait garder la tête hors de l'eau (je parle toujours du cheval).
La belle ne l'entend toutefois pas de cette oreille (ce coup-ci je parle de l'écuyère). Non seulement parce que ce malotru de Tuck était parti en la plaquant mais également par que le cirque a une arme secrète. Une arme de 30 centimètres au garrot et nommée "El Diablo", le plus petit cheval du Monde. D'où peut bien sortir un tel animal ? D'une vallée oubliée des hommes et du temps que les gitans appellent "La Vallée de Gwangi". C'est d'ailleurs l'un d'entre eux qui rapporta cet animal, au prix de sa vie, animal rapidement identifié par un paléontologue de passage (toujours pratique) comme étant un mesohippus.
Petit soucis : si le mesohippus est bien originaire d'Amérique du Nord, le dernier specimen est sensé être mort depuis plusieurs millions d'années. Allez donc savoir ce qui peut bien survivre dans cette vallée. La réponse, nous l'avons rapidement puisque les mêmes gitans qui ont rapporté "El Diablo", décident de s'en emparer pour le rendre à la Vallée. Ils sont aidés dans leur tâche par le paléontologue, curieux de connaître l'emplacement de cet endroit merveilleux qui lui apporterait non la fortune mais les honneurs.
Il y en a un autre à qui la fortune parle plus que les honneurs c'est Tuck qui se décide à partir à la poursuite des ravisseur du cheval, en compagnie de TJ et de l'indispensable gamin horripilant dont le rôle principal va de se faire enlever par un ptérodactyle.
Pour ceux qui s'intéressent au sort du mesohippus, je vous rassure : il disparait rapidement des écrans radars et, à l'heure actuelle, il doit probablement avoir retrouvé sa famille avec laquelle il gambade dans de verts pâturage. Ou alors il a servi d'apéritif à l'une des cochoncetés qui hantent la Vallée de Gwangi. En tête, le Gwangi en question dont le rôle est assez similaire à celui de King Kong à Skull Island : une grosse brute semeuse de peur et de mort. Il sera juste demandé de remplacer le gorille géant par un allosaure de taille normale tout crocs dehors.
Et un peu comme King Kong, le premier réflexe de ses découvreurs (le second, pour être précis, le premier étant de se mettre à l'abri) va être de le capturer et de le ramener comme attraction. Au diable le mesohippus, on vous apporte un puta*n de dinosaure!
Chacun commence à deviner ce qui va se passer : l'équation classique humains inconséquents + ville + monstre = catastrophe. En l'occurence, ce sont les même gitans qui ont libéré le mesohippus qui vont provoquer la catastrophe, en essayant de libérer le dino, avant la première représentation. Geste courageux, certes mais inconséquent puisque le nain envoyé faire le sale boulot parviendra à ouvrir la cage, juste à temps et au prix de sa vie. Je vous laisse imaginer le tableau qui s'offre aux spectateurs de l'arène de corrida qui s'y sont massés: une fois le rideau levé, ils se rendent compte que, primo, l'attraction est un allosaure, deuxio, il est en train de mâchonner un bonhomme comme un vulgaire chewing-gum à la chlorophylle... Tertio, la porte de sa cage est ouverte ! Il est temps d'avoir le courage de paniquer !
Eux qui voulaient du mémorable vont être servis, bien que le règne de terreur de Gwangi ne soit qu'assez court, finalement, le temps de se faire piéger dans une église en flammes et de laisser place à un happy end où tout le monde est content (sauf Gwangi).
En guise de conclusion, qu'ajouter ? Si ce n'est que dès qu'il s'agit de films de dinosaures, qui plus est mâtinés de westerns, je ne suis peut être pas totalement objectif mais, si d'aventure vous trouvez ce film (moi-même je ne sais plus comment il a atterri chez moi), n'hésitez pas à y jeter un coup d’œil pour peu que vous supportiez les trucages vintage et les cow-boys. Et puis comment dire non à un tricératops !?
Fiche technique:
Titre original : The Valley of Gwangi
Réalisateur : James O'Connoly
Pays : Etats-Unis
Durée : 1h36
Genre : Crocs et colts